
Après un premier report pour cause de coïncidence avec d’autres JPO, la journée portes ouvertes du multiplicateur Mohammed Livouo a finalement été programmée ce 6 mars 2025. La route qui conduit au lieu des activités est un parcours de combattant à elle seule. En plus des 27 kilomètres de nids de poules ( Bafoussam -Foumban ) qui riment avec des secousses pour les passagers, il faut encore s’imposer les nuages de poussière qui tournent en continu sur le tronçon Foumban-Koupa Matapit. Ledit tronçon est en travaux. Et comme il est de coutume sans la plupart des chantiers routiers au Cameroun, aucune mesure n’est prise pour protéger la santé des riverains et autres usagers : ils doivent boire jusqu’à la lie leur tasse de poussière.Conscients de ce que leur sort est leur préoccupation à eux seuls, les habitués ont développé des stratégies de circonstance : les conducteurs de motos ont prévu des pagnes pour leurs passagers, même si de pagne en vérité, il ne s’agit que de trompe-poussière.
On arrive à destination couvert, et plutôt bien couvert, de la couche épaisse de poussière rouge et blanche, mélange de terre rouge et de poudre de pierre magmatique.C’est donc dans cette tenue nouvelle que nous arrivons au lieu de la rencontre. Particularité qui tout de suite saute à l’œil, les participants, femmes et jeunes pour la plupart, sont déjà sur place. On est pourtant jour de marché et temps de jeûne pour cette population musulmane en majorité. Mais l’intérêt pour le bio a convaincu beaucoup de mettre pause sur certaines de leurs activités pour prendre part aux JPO.Mohamed, le multiplicateur, prend la parole pour introduire la séance. Il parle, dans son propos luminaire, de sa rencontre avec le CPF, de l’objectif de la micro-intervention et de son approche à lui pour y impliquer le maximum de personnes. En fait, il s’est solidement entouré pour permettre à la base d’élargir le spectre des ambassadeurs de l’agriculture biologique. Et ainsi que l’on le verra tout au long de l’activité, chacun des membres de son équipe joue un rôle spécifique car ayant assimilé l’essentiel des techniques.
La deuxième intervention est celle du représentant du CPF de Mbouo Bandjoun. Il présente la structure, sa philosophie chrétienne et les formations qu’elle offre, avec de revenir plus spécifiquement sur le Projet pôle de connaissances en Agriculture biologique en Afrique centrale et la pertinence des micro-interventions.La parole est ensuite donnée aux autorités traditionnelles représentées ici par un notable. Pour ce notable, cette micro-intervention « est un moyen de se libérer du diktat des produits chimiques qui rendent malades et appauvrissent les familles, pour en adoptant des techniques culturales saines, renouer avec la protection de la santé et de l’environnement. » Il espère que les JPO ne seront que le début d’une longue suite d’activités pour éduquer les siens et leur dévoiler beaucoup d’autres secrets.

L’intervention du notable est suivie par celle d’un technicien supérieur d’agriculture désormais à la retraite, qui saisit l’occasion pour, reprenant les mots du représentant du CPF, édifier en langue locale sur les dangers des pratiques culturales non durables. Il évoque nombre de maladies dont le cancer du col de l’utérus, causées par les produits chimiques de synthèse. « Je m’engage à présent à créer mon champ bio et à faire de l’élevage bio pour être l’ambassadeur de ces pratiques dans mon quartier », s’exclame-t-il pour finir.La suite est pratique, technique certes, mais toujours expliquée en langue locale. On y parle de fermentation de l’aliment, de prophylaxie depuis le premier jour jusqu’à la 45e journée d’élevage des poules de chair. Étape par étape, Mohamed et son équipe expliquent à la trentaine de participants réunis les dispositions à prendre pour réussir l’élevage bio , tout en dévoilant les secrets des herbes disponibles et le process pour les transformer en vaccin ou en vitamine pour soit prévenir, soit guérir les maladies de la volaille.L’assistance prend des notes, pose de questions, touche les produits, s’implique.

Les questions sur les formulations d’aliments reviennent et Mohamed et les autres prennent du plaisir à y répondre. Ils donnent par exemple une formule pour l’obtention de 50kg d’aliment fermenté. Pour celà,il faut prendre 30 Kg de maïs, y associer 10 Kg de soja, 6 Kg d’arachide, 2kg d’os et 2 kg de poisson avant de fermenter en utilisant de l’EM 5 ( Micro-organismes efficaces).La dernière phase consiste, lors de ces JPO, à visiter la ferme pour voir la différence entre les sujets bios et ceux conduits de manière conventionnelle. À l’issue, l’appréciation est unanime : » Le bio c’est le meilleur. »La satisfaction et le désir d’en savoir davantage se côtoient et fusionnent encore sur les visages quand les rideaux tombent sur cette autre journée de vulgarisation de l’agriculture biologique. Le désir ultime de Mohamed qui ne tarit pas d’éloges à l’endroit du CPF, est que le centre puisse avoir dans un futur proche, l’un de ses campus à Koupa-matapit. Il se propose de travailler à rechercher un lopin de terre pour la cause.
Preston Kambou, de retour de Koupa Matapit
Ensemble, faisons briller les étincelles